Pour décorer le salon de thé éphémère du Musée de l’Impression sur Etoffes durant le temps de Noël, « Les tables de Beatrice » propose une promenade parmi 40 assiettes chinées de services de table de Sarreguemines de 1890 à 1950 environ, période où l’art de la table était roi.
La faïencerie de Sarreguemines a produit durant près de 200 ans des pièces décoratives, objets en céramique, pièces de forme, panneaux décoratifs… et plus de 700 modèles de services de table. Cette faïencerie fut la plus importante des fabriques de l’Est et l’une des plus importantes d’Europe durant la seconde moitié du XIXe siècle. Elle amorça son déclin durant l’entre-deux-guerres, et ferma définitivement en 2007.
Les grands services de table apparurent vers 1845. Parmi les plus célèbres figurent les modèles Papillon, Rouen ou encore le service Obernai créé par Henri Loux en 1903. Les sources d’inspiration sont multiples : la botanique, l’art asiatique, la porcelaine genre anglais, les styles des arts décoratifs des villes… et à partir des années 1930, des noms de villes ou des prénoms.
Avec l’essor de l’industrie, la bourgeoisie s’enrichit et le service de table donne le ton d’une maison. Il pouvait être composé de plus de 100 pièces : autour de la soupière, on retrouvait plusieurs séries d’assiettes pour en changer à chaque service, des plats et de multiples accessoires. L’apogée de l’art de la table se situe des années 1870 à 1914.
Plusieurs assiettes ici reflètent la période “Terre de Fer”,appellation commerciale désignant une céramique en faïence fine, proche de la porcelaine, à laquelle sont mêlés feldspath et kaolin pour la rendre plus blanche et plus résistante, une demande de la clientèle. Fabriquée dans plusieurs faïenceries du Nord, de l’Est et de la région parisienne, la Terre de fer apparaît en France vers 1770 et atteint son pic de production autour de 1900. La vaisselle imprimée à partir de plaques de cuivre est souvent monochrome : bleue, rouge, plus rarement verte. Ces services figurent parmi les plus recherchés de nos jours. Ayant passé deux guerres mondiales, ils se font rares, mais certaines familles les ont soigneusement conservés. Ici sont représentés les modèles Bryonia, Flore, Bertha, Mozart, Stella, Cérès, Carmen et Fontanges (le seul ici à être rouge).
Dès 1801, la faïencerie publie des catalogues de la totalité de ses fabrications. Celui de 1900-1925 montre la grande variété des services monochromes (Nobilis, Metz…) ou polychromes comme Montmorency ou le Piccola. Un service pour 12 personnes comprenait environ 130 pièces, avec plusieurs douzaines d’assiettes plates ou à dessert. Le catalogue classe les services par forme car un moule servait à l’impression de plusieurs décors : forme Viennoise, Bambou, Renaissance, Rouen, etc. Ici on trouve les décors Nobilis (forme Loréna), Louis XV (forme viennoise), ou les formes Boule des assiettes terre de fer.
En 1921, notons la production du service Hansi-Annales, illustré par 150 dessins originaux de l’artiste patriote. Il est visible au musée Hansi à Colmar.
Entre les deux guerres, la production se poursuit sur deux sites avec Digoin, et des services sont stylisés, avec des formes plus géométriques et moins de couleurs, style Art Déco.
Sarreguemines a aussi fabriqué des services en barbotine, souvent spécialisés : à poissons, à huîtres, à asperges ou à fruits, leur couleur et leur relief évoquant leur usage.
Exposition du salon de thé ouverte jusqu’au 24 décembre 2021, tous les jours sauf lundi de 13 à 18h Musée de l’Impression sur Etoffes à Mulhouse,
14 rue Jean-Jacques Henner. Tél. 03 89 46 83 00
Mise en espace proposée par « Les Tables de Béatrice » à Mulhouse
Rédaction : Béatrice Fauroux, d’après « La Faïencerie de Sarreguemines » par A. Benedick et l’association Sarreguemines-Passion